lundi 2 avril 2012

Au nom de dettes publiques ignominieuses, l’horreur économique


Madrid 29/03/2012






On résume pour ceux qui n’ont pas suivi : presque partout en Europe, particulièrement dans la zone euro, sous l’injonction des marchés financiers, sont mises en œuvre des politiques « d’austérité » ayant pour dénominateur commun de tailler dans les dépenses publiques et la protection sociale, d’augmenter les prélèvements obligatoires pour les « classes moyennes », le tout, le plus souvent accompagnées de mesures de « réforme du marché du travail » visant à réduire les salaires et le droit du travail. 
Les objectifs sont pour les premières de donner des gages aux créanciers des États de la volonté des dirigeants de réduire les déficits et l’endettement public qui ont explosés depuis la crise financière de 2008, pour les secondes, de favoriser la création d’emplois en instaurant une bonne « compétitivité » et « flexibilité », ou « pauvreté » et « précarité » (ça dépend d’où on parle).

Ceux qui prescrivent et mettent en œuvre ces mesures disent en espérer des effets positifs au moins à moyen terme, en attendant, il s’agit pour eux de faire le dos rond pendant les désordres sociaux provoqués par leurs décisions (les manifestations jeudi dernier en Espagne étaient par exemple particulièrement impressionnantes). 



Grève générale en Espagne - mars 2012

 

Le chaos à la clé des politiques d’austérité : bêtise ou prévarication ?


Sans surprise, les instituts de conjoncture annoncent la récession et l’explosion du chômage pour un nombre croissant de pays. C’était tellement évident, qu’il est permis de se demander si on a affaire à de la bêtise ou à de la prévarication, dans le cadre d’un plan bien huilé de mise à mort de ce qui reste de « socialiste » en Europe (autrement dit d’économie non marchande publique), pour le confier aux intérêts privés (la bancassurance rêve par exemple depuis toujours de récupérer tout le pactole de la prévoyance).
J’ai du mal avec la théorie du complot, alors, va plutôt pour l’hypothèse de la bêtise, comme incapacité à penser l’interdépendance et la complexité, l’ignorance ou oubli de quelques vérités en macroéconomie.

L’appel au sens commun pour faire passer le sophisme


Le bien fondé des politiques d’austérité conduites ne butte pas l’entendement d’une grande partie des opinions publiques. « Ben, oui, quoi, où est le problème ? Faut bien arrêter de dépenser pour rembourser cette dette. » C’est tout le génie de la contre-révolution néolibérale conservatrice que de s’appuyer sur le sens commun des populations (terme plus adéquat que « bon sens » dans le cas présent, comme d’ailleurs beaucoup d’autres).
C’est beaucoup plus simple de faire passer que « L’Etat, c’est comme une famille, on ne peut jamais dépenser plus ce qu’on gagne, sinon on devient surendetté et on entre dans une spirale infernale. », que de questionner l’économie de marchés financiers qui a été mise en place depuis le milieu des années 80 et les contraintes qu’elles font peser sur l’action publique et son financement, ou la pertinence des politiques fiscales en Europe.


Philippe Ramette Objet à voir le monde en détail (1990-2004) 
au Mac/Val de Vitry

 
Dans un petit livre au titre provocateur « Vive la dette»,  Marc Bousseyrol s’efforce de déconstruire les évidences les plus communes sur les dettes publiques. Par exemple, il réfute l’argumentation de l'héritage de la dette que nos enfants devront payer :

« Non, la dette publique n'est pas un fardeau générationnel : chaque bébé ne naît pas avec une dette de 18.700 euros sur la tête, comme l'affirme le rapport Pébereau [rapport sur la dette publique de 2005, rédigé par Michel Pébereau, le président de BNP Paribas, ndlr], mais au contraire avec un héritage net de 11.000 euros, si l'on tient compte du patrimoine public. La dette sert à financer des infrastructures, des écoles, des hôpitaux etc., dont bénéficieront les générations futures. »

L’Etat en voie de décomposition vs l'enrichissement des rentiers


L’argument vaut tant que le démantèlement de l’Etat-providence n’est pas trop avancé. Pour Xavier Timbeau, directeur du département analyse et prévision de l’OFCE, la Grèce et le Portugal subissent une décomposition de l’Etat : « On y brade des actifs publics, on démantèle la protection sociale. C’est un peu ce que l’on a fait au bloc soviétique dans les années 1990, avec les succès qu’on connaît. »

Selon lui, la clé d’une thérapie autre que celle de l’austérité, ce sont des taux d’intérêts publics bas pour tous les pays de la zone euro, bas jusqu’à devenir négatifs en termes réels, c'est-à-dire inférieur à l’inflation. A la place de cela, ces deux pays empruntent encore à 5 %, ce qui les conduit inévitablement dans le mur.
Ces emprunts sont en partie souscrits par les banques privées qui font au passage une belle marge en se faisant refinancer par la BCE à 1%. Cherchez l’erreur systémique !


Gilles Barbier - Révolution à l'envers (2002) au Mac/Val de Vitry

 

Une initiative citoyenne européenne pour la suppression des dettes ignominieuses


« Que faire ? » se demandait Lénine en 1902. L’UE nous propose une disposition de « démocratie participative » : L'initiative citoyenne européenne, inscrite dans le traité de Lisbonne  et applicable à partir d’aujourd’hui.
Elle permet « à un million de citoyens de l'UE de participer directement à l'élaboration des politiques européennes, en invitant la Commission européenne à présenter une proposition législative ».
Je suis un brin sceptique mais je vais signer celle qui a été lancée à la suite de la catastrophe grecque et qui concerne les dettes publiques :

Nous vous invitons (adressé au président de la commission européenne), selon l’article 8 du Traité de Lisbonne, à introduire et finalement faire voter dans l’Union Européenne les propositions suivantes :

- Supprimer pour chaque partie unilatéralement la partie de la dette publique qui rentre dans la catégorie de la “dette ignominieuse”. La plus grande partie de la dette est composée de la capitalisation des intérêts, qui s'amplifie depuis plusieurs dizaines d'années. Le capital des emprunts a déjà été remboursé. En d’autres termes, annuler les INTERETS COMPOSES.

- Établir le Principe de “l’état de nécessité”. Quand l’existence économique et politique d’un État est en danger à cause du service de cette dette odieuse (chômage galopant, effondrement des salaires et des retraites, fermeture d’hôpitaux et d’écoles, des services sociaux, misère personnelle etc.), le refus de paiement est nécessaire et justifiable.

UN MILLION DE SIGNATURES POUR “L’EUROPE DE LA SOLIDARITE”

Collectif pour un audit citoyen de la dette

L'horreur économique de Viviane Forrester (1996) 

Et si l'on recréait la dette publique perpétuelle ?   Libération 1/12 

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Sur ce blog 

Dettes publiques, euro et politique : dernières nouvelles du bourbier

Contre le discours dominant sur la dette publique

Le salut par l'Europe ?




programmé au festival du cinéma du réel


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